Little Harlock stories | ||
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Wanderlust Disclaimers : le personnage principal m'appartient. Chronologie : quelque part entre « avant » et « au début ». Interprétation libre. Et dévoyée. Notes de l'auteur : défi récupéré par hasard, consistant à écrire sur une image. Ce que j'ai fait, en particulier à cause du titre et parce qu'on a toujours besoin de pratiquer les descriptions paysagères. Orthographe : phénix. Sans « y ». Je sais. Avertissement : références multiples à ma cosmogonie personnelle. Mon objectif n'était pas d'être explicite. Pour SomeCoolName, à condition de parvenir jusqu'ici. Merci pour l'image. — 1 Le dernier méandre du chemin révélait un îlot de verdure oublié. Le gosse avait l'air d'apprécier. Il n'avait cessé de se plaindre et de traîner les pieds tout au long de l'ascension, arguant qu'il perdait son temps, qu'il aurait mieux fait de s'entraîner au simulateur de vol et que Bob aurait sûrement préféré un peu d'aide pour l'inventaire, mais à présent il écarquillait les yeux, ravi, tournant la tête de tous côtés pour ne perdre aucune miette du spectacle. — C'est génial, Mel ! Tu savais que des arbres pouvaient devenir aussi grands pour de vrai ? Melvin
Hardner retint un sourire. Ça, c'était bien la réaction typique d'un
jeune galactique plus habitué aux stations orbitales et aux mégalopoles
qu'aux virées en pleine nature ! se dit-il. — Oh, ceux-là sont encore petits,
répondit-il d'un air soigneusement blasé. Il y en a de
plus hauts un peu plus loin. Le garçon eut l'intelligence de ne pas renchérir. Heureusement pour lui, il aurait perdu. Quelques centaines de mètres les séparaient encore du col. Hardner s'octroya une pause lorsqu'il parvint sur la crête. Avec une lenteur calculée, il inspira profondément, goûtant avec volupté les odeurs de mousse et de terre humide qui chatouillaient ses narines, et prit un temps infini pour imprimer dans sa mémoire, parcelle par parcelle, la totalité du paysage qui s'étalait sous ses yeux. Puis il soupira de soulagement. Il retrouvait encore aujourd'hui son écrin de verdure intact, mais qui sait ? La prochaine fois, tout pouvait avoir disparu. La nature était éphémère et ses ennemis nombreux. — Il y a un lac, Mel, regarde ! Le gosse courait presque, sautant de pierre en pierre tel un cabri. Hardner le suivit, amusé (et beaucoup plus prudemment). Il n'avait pas vu le gosse aussi excité depuis qu'il lui avait laissé les commandes du Phényx pour un décollage. Bordé de mélèzes centenaires, le chemin
descendait en pente douce vers les berges d'un lac de montagne, dont les
eaux aigue-marine reflétaient les pics enneigés. Hardner laissa son
regard se perdre dans le lointain. Dans un mois, une semaine, dès demain
peut-être, l'appel de l'espace se ferait trop insistant. Dès demain
peut-être, le Phényx reprendrait son errance entre les étoiles. Le gosse
n'avait jamais connu que cette vie – c'était probablement pour cette
raison qu'il ne tenait pas en place. — Mel, il y a un château aussi ! Mel ! Comme
le gosse, le temps poursuivait sa course effrénée. Demain verrait
d'autres mondes, des villes grouillantes, toutes identiques et toutes
différentes, demain l'emmènerait toujours plus loin. — Mel ! Le contrebandier ferma les yeux. Le temps ne l'attendrait pas. Ici, il lui semblait pourtant possible de le ralentir. En ces lieux de quiétude, à l'encontre de toute logique, il paraissait soudain envisageable de suspendre le voyage, juste un instant, et de faire une pause dans l'éternelle fuite en avant. — Mel ? Tu rêves ? Hardner sursauta. Le gosse était revenu à ses côtés et le considérait avec une expression perplexe. Le contrebandier haussa les épaules. Les fantômes de son passé voletaient partout autour d'eux, glissant d'arbre en arbre, chuchotant des mots inaudibles à son oreille. Mais inutile d'ennuyer le gosse avec ça. La forêt, le lac et les édifices qui avaient été bâtis alentours appelaient aux souvenirs. L'enfant se forgerait les siens propres, et les histoires qu'il construirait grâce à eux n'appartiendraient qu'à lui. Le gosse désigna le château du doigt. Jadis, ses tours effilées avaient dû défier le ciel. Aujourd'hui il n'en restait que quelques pans de murs effondrés, mangés par le lierre et le liseron. — Des chevaliers ont habité ici, à ton avis ? La figure du gamin s'épanouit. — Ouais ! s'exclama-t-il. Des chevaliers pirates ! Armé d'une branche souple, le garçon se lança dans un combat farouche contre les fougères et disparut bientôt, avalé par le sous-bois. — T'éloigne pas ! lui cria Hardner, bien conscient que le gosse ne l'écouterait de toute façon pas. Fichu gamin, incapable de se poser ne serait-ce qu'une minute. L'adulte secoua la tête tout en poursuivant sa route vers les rives du lac. Bah, le gosse était débrouillard, il ne se perdrait pas. Et les ruines du château constituaient un bon point de repère. Parvenu au bord de
l'eau, le contrebandier laissa distraitement des vaguelettes lécher le
bout de ses bottes, puis il avisa une souche. Le bois séché par le
soleil avait été lissé par la pluie et le vent, et un renfoncement dans
l'écorce formait un fauteuil idéal. L'endroit parfait. Lorsqu'il se retourna, son regard pétillait de joie. — Hey ! Bonjour, petite fleur des champs ! Le
chemin lui avait amené une fillette chaussée de sandales et vêtue d'une
robe d'été blanche, et qui le gratifia d'un sourire resplendissant en
retour. Plus jeune que le gosse, elle avait dû fêter son neuvième
anniversaire le mois dernier. Ses longues mèches blondes frôlaient
presque ses genoux. — Ta mère ? demanda-t-il. L'enfant baissa les yeux. — Elle attend au vieux chêne. Elle a dit qu'elle n'irait pas plus loin. Hardner
s'assombrit une fraction de seconde. La mère de l'enfant ne viendrait
pas. Elle n'était jamais venue. Le contrebandier se força à se
reprendre. Ne gâche pas ces précieuses minutes, se morigéna-t-il.
Profite du temps présent. Demain, tu seras reparti. — Tu as encore grandi, toi ! Elle se tortilla pour se dégager des bras de l'adulte. Une fois à terre, elle exhiba le petit sac de toile brodé qu'elle portait en bandoulière. — J'ai apporté des myrtilles, annonça-t-elle. Le
rituel était immuable. L'adulte et l'enfant s'assirent côte à côte et
partagèrent en silence les fruits sucrés. La fillette lui montra ensuite
divers trésors que seuls les enfants savent trouver : une plume, un
bracelet de laiton, une poignée de cailloux brillants. Hardner admira de
son air le plus sérieux, regretta de n'avoir rien amené, fouilla ses
poches. Ceci, peut-être… — Passe le bonjour à ta mère pour moi, d'accord ? Comme obéissant à un signal entendu d'elle seule, la fillette sauta soudain sur ses pieds, posa un rapide baiser sur la joue d'Hardner, puis s'éloigna dans la direction d'où elle était venue. Elle se retourna en direction d'Hardner lorsqu'elle parvint au premier coude du chemin. — Il faut que j'y aille ! cria-t-elle. Maman attend ! Le gosse choisit ce moment pour débouler d'un buisson, échevelé, couvert de terre et de feuilles, et stoppa sur le chemin à un mètre à peine de la fillette. Surpris, les deux enfants se figèrent un bref instant tandis que leurs yeux se croisaient. Puis le gosse jaugea sa cadette sans bouger, de haut en bas, les bras croisés et les lèvres pincées en une moue dédaigneuse. La fillette quant à elle eut un mouvement quasi imperceptible de recul apeuré, avant de tirer la langue au garçon et de s'enfuir sur le chemin. Hardner s'attendait à ce que le gosse la
poursuive, ou alors qu'il reprenne son exploration avortée et
disparaisse à nouveau dans les fourrés, mais non. La rencontre semblait
l'avoir calmé. — Tu la connais, Mel ? Le gosse parut réfléchir intensément, puis hésita visiblement. Il avait l'air gêné, ce qui était mine de rien une expression très inhabituelle chez lui. « Elle est mignonne, ma blondinette, hein ? » songea Hardner. « C'est ça qui te trouble, microbe ? » Le contrebandier se retint à temps de ricaner. Le petit monstre clamait toujours à qui voulait l'entendre qu'il ne s'attacherait jamais à personne. Pas facile de museler ses sentiments, hmm ? Le garçon ne se décida à reprendre la parole qu'à mi-chemin du trajet retour. — Elle avait l'air gentille, lâcha le gosse dans un souffle. Comment elle s'appelle ? |
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