Kiss me












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|| 3.3 ||

Simple performance sportive


Disclaimers : je nierai en bloc toute tentative de m’attribuer la paternité du comportement de ces personnages.

Note de l’auteur : fallait bien conclure.



Ce qui était certain en tout cas, c’était qu’ils avaient trop bu. La bouche pâteuse et le mal de crâne constituaient déjà des indices évidents, mais le syndrome du « trou noir » restait la preuve la plus flagrante des excès de la veille.
Le commandant Warrius Zero grimaça. À ce qu’il semblait, sa mémoire s’était égarée quelque part dans un bar sordide, au beau milieu d’un stupide défi à boire contre un stupide pirate. Il n’avait pas la moindre idée de la façon dont il s’y était pris pour revenir jusqu’au Karyu, et il espérait sincèrement que ce n’était pas Marina qui l’avait ramené.
Il grogna. Quelqu’un l’avait forcément ramené, de toute façon, ce qui signifiait que Marina apprendrait le détail de ses frasques tôt ou tard. Et davantage tôt que tard, d’ailleurs. Son second se révélait toujours particulièrement habile pour obtenir de tels renseignements.

— Je vais me prendre un savon, soupira-t-il tout haut.

Warrius s’aperçut alors d’un certain nombre de problèmes.

— Mmh ? Qu’est-ce que tu racontes ?

Premièrement, il y avait quelqu’un dans son lit.
Deuxièmement, ce n’était pas quelqu’un de son équipage.

— Harlock ? Mais… qu’est-ce que tu fous là ? s’exclama Zero en se redressant brutalement.

Oh. Et troisièmement…

— Moi ? Ben j’suis un peu chez moi, quand même…

… ce n’était pas son lit.
Ni même son vaisseau.
Soudain pleinement réveillé, tout à fait dégrisé, et sans se soucier de son mal de tête tonitruant, Zero bondit hors du lit, constata, paniqué, qu’il était fort peu vêtu (pas du tout, même), attrapa la première chose qui lui tomba sous la main pour se couvrir et roula des yeux affolés devant l’étendue du désastre.

— Mais qu’est-ce que quoi comment pourquoi ? bafouilla-t-il.

Oui, parfaitement : comment en était-il arrivé là ?
Zero inspira profondément. Récapitulons. Il se trouvait à bord du vaisseau d’Harlock, dans la chambre d’Harlock, enroulé dans un drap du lit d’Harlock après s’être réveillé à côté d’Harlock. Sans ses vêtements. Le pirate était d’ailleurs dans le même état, ce qui ouvrait des tas de possibilités sur la façon dont ils avaient occupé leur nuit.
Si seulement ses souvenirs n’avaient pas été aussi flous…

— Mais comment…

Toujours allongé dans le lit, Harlock s’étira tel un chat et lui adressa un sourire goguenard, bien qu’un peu vaseux.

— Comment ? Me semblait pourtant que tu avais fini par comprendre le mode d’emploi, vu ta performance.
— Mrf, renifla Zero. … Quoi, qu’est-ce qu’elle avait, ma performance ?

Harlock leva les deux mains en signe d’apaisement.

— T’inquiète, c’était parfait… – le pirate fronça les sourcils – Tu ne te souviens vraiment de rien ?

Zero répondit d’un haussement d’épaules. Des flashs lui revenaient par bribes, trop fantasques cependant pour qu’il puisse s’agir d’autre chose que d’hallucinations provoquées par l’alcool.

— On a testé toutes les combinaisons possibles, l’informa obligeamment Harlock.

… ou pas, en fait.

— Sérieux ?
— Sérieux.

Le pirate fit la moue.

— N’empêche, j’suis déçu. J’espérais bien t’avoir impressionné.
— Je suis impressionné, là n’est pas la question ! Je suis impressionné de me retrouver ici, si tu veux tout savoir !

Zero s’attendait à un sarcasme. Il ne vint pas. Au lieu de leur expression ironique habituelle, les yeux noisette d’Harlock reflétaient un éclat de regret. Les effets de la gueule de bois, peut-être, mais bon…
Des regrets ?

— Oui mais si tu ne te souviens de rien, ça n’a aucune espèce d’importance, hein…

Zero hésita. Il se sentait glisser en terrain inconnu et il n’était pas vraiment sûr de le vouloir.

— Laisse-moi de temps de me rhabiller et de reprendre mes esprits, d’accord ? biaisa-t-il.
— Dans cet ordre ?
— Dans l’ordre que je veux, merde !

Bon, alors… Le militaire trouva sa veste d’uniforme au pied d’un fauteuil, son pantalon sous le lit, une botte sur le bureau et l’autre dans un tiroir ouvert.

— T’aurais pas vu mon caleçon, par hasard ?
— Nope. D’ailleurs si tu vois le mien, tu peux me le lancer ?

Zero haussa un sourcil.

— Eh, j’suis pas ta femme de chambre ! Démerde-toi !
— Vu ta réaction tout à l’heure, je voulais juste éviter de me lever dans ma tenue, ricana Harlock.
— Au point où j’en suis, tu sais… soupira Warrius.

Le pirate le laissa néanmoins farfouiller encore quelques minutes (et réussir à mettre la main sur une chaussette) avant de daigner enfin bouger.

— Ouch. Me faut une aspirine, marmonna Harlock.

Il se dirigea vers la salle de bain sans paraître se préoccuper le moins du monde de passer à côté de Zero complètement nu.

— T’en veux une aussi ?
— Je veux que tu enfiles quelque chose d’abord, répondit aussitôt Zero avant de se rendre compte qu’il aurait mieux fait de s’abstenir.

Et, de fait, Harlock revint sur ses pas pour lui lancer un regard curieux.

— Tu es conscient de ce que tu viens de dire, là ?
— Je… – Zero se pinça l’arête du nez – Des vêtements. Je veux que tu enfiles des vêtements. Tu me perturbes.
— Tu n’imagines pas à quel point ça me fait plaisir.
— De quoi ? Te balader à poil devant moi ?
— De te perturber, corrigea Harlock, tout sourire.

Zero hésita à nouveau. Malgré le sourire, l’éternel air fanfaron, pourquoi avait-il l’impression qu’Harlock prenait toute cette affaire beaucoup trop au sérieux ? Pourquoi cela le perturbait-il autant ?
Pourquoi ne s’était-il pas posé ces questions avant de se laisser entraîner dans cette histoire ?
Il réfléchit. Avait-il envie de faire une croix sur cette nuit, de la rayer définitivement de sa mémoire, et d’affirmer à Harlock qu’il ne s’était rien passé, que c’était la pire expérience de sa vie et que jamais on ne le reprendrait à faire pareille connerie ?

— Je…

Ce serait la solution de facilité, il fallait le reconnaître, mais non, il n’en avait pas envie. Après tout, s’il en jugeait les fragments que son cerveau alcoolisé avait réussi à sauver, il avait passé une super nuit !
D’un autre côté…

— Je ne veux pas que la moindre petite rumeur de tout ceci arrive aux oreilles de Marina. C’est clair ?

Il était conscient que ce n’était pas la meilleure chose à avouer à Harlock. Ce foutu pirate n’aurait probablement aucun scrupule à s’en servir comme moyen de chantage. Pire, cela l’amuserait, très certainement.
Mais tant pis. Marina était toute sa vie, Harlock n’était… qu’un foutu pirate.

— Je n’ai pas l’intention de prendre la place de Marina.

Harlock était amusé, c’était évident. Pourtant, au ton de sa voix, il était loin de prendre la réaction de Zero à la légère. Et il baissa les yeux. Comme s’il était soudain gêné.

— Tu souhaites bâtir un futur avec elle qui n’est pas celui que je conçois, continua le pirate.

Comme s’il craignait de franchir une ligne invisible.

— Je n’aime pas la routine. Il me faut du changement, de l’imprévu, il me faut de la variété, il me faut de l’adrénaline, il me faut du sport.

Comme s’il cherchait, malgré tout, le courage de tenter sa chance.

— … Mais je veux que tu saches que tu peux compter sur moi, si jamais tu as envie… de liberté.

Zero fixa intensément Harlock, chercha la plus petite trace de moquerie au fond des prunelles, n’y trouva rien d’autre qu’une sorte de résignation anticipée. Pas d’espoir. Aucune attente. Pas de déception.
Et pourtant…
Il pensa successivement « sûrement pas », puis « la liberté, hein… » et « pourquoi pas ».
Il répondit « je vais y réfléchir ». Cela ne l’engageait pas. Cela ne le mettait pas hors course non plus.
Les possibilités étaient infinies.


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