Des jours ordinaires | ||
![]() ![]() ![]() ![]() ![]() ![]() |
Chocolarcadia
Des oeufs, des cloches, un lapin
Disclaimers :
rien de ce qui suit ne m’appartient. Sauf l’idée,
bien sûr, mais je ne sais pas si je dois le clamer haut et fort
ou non.
Chronologie : 84, à l’exception de la cuisinière et du chef machine, empruntés à 78. Je fais ce que je veux avec les séries et j’assume. Note de l’auteur : c’était Pâques. Et ce week-end, c’était lézardage au soleil. Mais la productivité est bonne, quoi qu’un peu stupide. —
Ils avaient été
pris de court. Ce n’était pourtant pas les signes
avant-coureurs qui avaient manqué. Harlock reconnaissait
qu’il s’était volontairement maintenu à
l’écart du débat (des broutilles, avait-il
songé, ça passera tout seul), et ne
s’aperçut de l’ampleur du problème que
lorsque Miss Masu envahit ses quartiers après le dîner.
Accompagnée de Tochiro, Kei, du docteur Zero et du chef machine
Maji, la cuisinière semblait bien décidée à
organiser une réunion de crise. L’urgence était a priori
avérée, et si le capitaine en croyait la mine
désespérée de Masu, il était
peut-être déjà trop tard.
— C’est Pâques, demain ! se lamentait la cuisinière. La petite s’est couchée en étant persuadée que des cloches vont venir déposer des œufs sur l’Arcadia, cette nuit !… Ou un lapin, corrigea-t-elle. Je ne suis pas trop sûre. Harlock leva un sourcil perplexe. Comment ça, un lapin ? — Des… cloches doivent apporter des lapins à bord ? C’est n’importe quoi ! — Euh… Non, capitaine. C’est juste un lapin, et il apporte des œufs également. Lydia mélange deux légendes distinctes. Elle a dû penser que ça maximiserait ses chances. Ou alors quelqu’un s’est emmêlé les pinceaux en racontant ses histoires, termina Masu tout en lançant un regard suspicieux au docteur. — Je suis favorable à la préservation de la diversité de la culture terrienne, se défendit le médecin. Et après tout, Lydia a bien le droit de croire aux cloches et au lapin de Pâques ! — Ah ! Et je suppose que vous lui avez parlé de la petite souris, aussi ? persifla Masu. Harlock observa l’échange sans trop comprendre, espérant des explications, mais de toute évidence personne ne paraissait prêt à lui en fournir. — Woho ! Stop ! finit-il par crier. Assez avec toutes ces bestioles ! Qu’est-ce que vous voulez, au juste ? Tochiro lui fit un clin d’œil entendu. — J’ai donné mon accord pour une chasse à l’œuf, demain matin. Mais j’ai supposé que tu aimerais être au courant avant. … Et que tu confirmes que c’est bon pour toi, ajouta le petit ingénieur après une infime hésitation. — Oh, vous n’allez tout de même pas refuser, capitaine ! plaida Masu. C’est pour Lydia ! Vous ne voudriez pas décevoir cette pov’ choupinette ? — Non… Bien sûr que non. Soudain mal à l’aise, Harlock fixa ses quatre visiteurs l’un après l’autre. Depuis quand avait-on besoin de se rendre chez lui en force pour l’organisation d’une activité aussi puérile qu’une « chasse à l’œuf » ? se demanda-t-il. Quoi que puisse être une chasse à l’œuf, d’ailleurs. Le capitaine ne se souvenait pas que les œufs nécessitaient d’être chassés. C’était plutôt statique, un œuf, d’ordinaire. Il y avait forcément une subtilité qui lui avait échappé. — Autre chose, sinon ? L’expression que Masu partageait avec Zero signifiait que oui, il y avait autre chose, et que cet autre chose risquait apparemment de beaucoup moins lui plaire. — C’est la première fois que vous entendez parler de Pâques, capitaine, n’est-ce pas ? fit Masu. C’était exact, mais Harlock se contenta de répondre « humf ». Tout ceci ressemblait furieusement à une fête familiale et cela ne lui donnait pas trop envie de s’étendre sur le sujet. Il n’avait jamais fêté Pâques ni aucune autre fête familiale (ou peut-être Noël, à la rigueur), il ne risquait plus de célébrer une quelconque fête familiale à présent et si Lydia en voulait une, grand bien lui fasse, mais qu’on ne compte pas sur lui pour participer à cette histoire d’œufs et de lapin. Même si une poule eût été probablement plus indiquée, mais bon… la logique faisait rarement bon ménage avec le folklore. Harlock soupira. — Les cloches de Pâques déposent les œufs pour les enfants, poursuivait Masu. — Le lapin, corrigea le doc. — Peu importe. Lapin ou cloches, faut qu’on fasse ça cette nuit. Ah. Et donc ils avaient besoin de s’approvisionner en œufs, crut deviner Harlock. Sauf que ce n’était pas le genre d’expédition qui se résolvait d’un claquement de doigts, hein… — Il est trop tard pour ravitailler, rétorqua-t-il. Vous croyez qu’on peut se matérialiser à côté d’une station spatiale pour aller faire des courses comme ça ? Et où voulez-vous trouver des œufs, d’ailleurs ? — Ce sont censées être des friandises, captain. Pas des vrais œufs. — Oui ben même si c’est plus facile d’approvisionner des friandises que des vrais œufs, le problème reste le même. On est trop loin d’une base de ravitaillement sûre. Va falloir faire avec ce qu’il y a en cambuse. — À Pâques, la coutume veut que l’on offre des figurines en chocolat, termina Masu d’une voix doucereuse. Harlock se figea le temps d’assimiler l’information. Il n’y avait cependant aucune chance qu’il ait mal compris. Et ils étaient venus à quatre chez lui. C’était donc un piège. — Et alors ? tenta-t-il dans le vain espoir de gagner du temps. — Je me suis dit que vous pouviez nous dépanner avec votre réserve personnelle, répondit la cuisinière du tac au tac. Un piège, effectivement. Très bien pensé, et particulièrement retors. — Hors de question que quiconque touche à ma réserve personnelle ! s’exclama-t-il en se dressant à demi derrière son bureau sous le coup de l’indignation. Masu adressa un sourire vicieux à la cantonade. — Ahah ! Je vous avais bien dit qu’il avait du stock ! triompha-t-elle. Prêcher le faux pour connaître le vrai, hmm ? Harlock pinça les lèvres. Merde. Il venait de se faire avoir comme un débutant. Eût-il nié être en possession de chocolat, personne n’aurait rien pu prouver contre lui. Mais maintenant, il était trop tard. — Une petite contribution, capitaine ? quémanda Kei avec une moue délicieuse. Tout le monde a mis la main à la poche, vous savez… — J’ai bricolé des moules, Harlock, intervint Tochiro. Il n’y a plus qu’à fondre du chocolat dedans pour en faire des œufs, des cloches et des lapins. — Et des poules, ajouta Maji. Et des homards, aussi. — Mon chocolat n’est pas destiné à être fondu et transformé en homard ! s’emporta Harlock. Bordel, vous êtes au courant du prix d’une seule tablette ? — Attends… Tu n’étais pas un pirate, aux dernières nouvelles ? Depuis quand tu t’inquiètes du prix de la marchandise ? — Ce genre de marchandise est quasiment introuvable quand on cherche de la qualité, grommela le capitaine de l’Arcadia, vexé. — Ben on se contentera de ton chocolat de moindre qualité, alors… — Grmf. Je n’ai pas de chocolat de moindre qualité. Harlock croisa les bras, buté, affronta bravement les regards réprobateurs des membres de son état-major pendant à peu près une demi-seconde, puis céda. Ils avaient raison, tous. Personne à bord ne voulait que Lydia soit déçue, y compris lui. Il haussa les épaules et conclut l’échange d’un geste désinvolte, comme si cela n’avait en fin de compte aucune importance (alors que si, nom de dieu !). — Noir ou au lait ? demanda-t-il. — Les deux. Et du blanc aussi, si tu as. — On parle de chocolat, Tochiro. Le chocolat blanc, c’est pas du chocolat. Le capitaine soupira, foudroya ces maudits voleurs de chocolat avec son regard de psychopathe-qui-veut-tuer-des-gens, vérifia que chacun ait un mouvement de recul instinctif et, une fois qu’il fut assuré que le message « je désapprouve complètement ce que vous m’obligez à faire » était bien passé, il ouvrit la porte d’un placard camouflé dans la cloison. — Bon, alors… J’ai noisettes, nougatine, écorces d’orange, éclats de cacao, mais ce n’est pas tellement prévu pour cuire, ça… C’est dommage, à Noël j’avais tout un carton de chocolat pâtissier, mais je l’ai mangé. — Vous en avez fait des cookies, capitaine, précisa obligeamment Masu. — Et un fondant au chocolat. Très bon, soit dit en passant. — Euhm… Des cookies ? Tu fais des cookies ? Tochiro n’avait pas l’air d’en croire ses oreilles. — Oui, et… ? — Mais quand… Comment ? — La nuit. Et si tu me dis que c’est bizarre de cuisiner du chocolat la nuit, je te signale que c’est un peu ce que vous êtes en train de faire en ce moment. Avec mon chocolat. Sans cesser de pester contre ce qui lui apparaissait comme du gaspillage en règle de chocolat, Harlock farfouilla dans son placard et sélectionna avec soin ses tablettes avant d’en ressortir une boîte de « chocolat de moindre qualité ». Qui était malgré tout de l’excellent chocolat, c’était un crève-cœur de s’en séparer (surtout pour le faire cuire), mais c’était pour la bonne cause. — Je vous préviens, je compte bien récupérer une bonne partie des homards que vous allez fondre avec ça, grogna-t-il. — Pas de problème, captain. Vous n’avez qu’à participer à la chasse demain. Tout ce que vous trouverez est à vous. Okay. Ça semblait correct. Harlock envisagea un instant de suivre les quatre pirates qui s’enfuyaient avec leur butin, ce afin de contrôler le processus « je transforme du bon chocolat en homards » (et en cloches, et en lapins, et en dieu sait quoi), puis renonça. Tout bien réfléchi, s’il y avait chasse demain, autant qu’il prenne une bonne nuit de repos pour être en forme. Il eut un demi-sourire. L’Arcadia était son vaisseau. Il en connaissait les moindres recoins. Il partait donc avec un bon avantage. Et s’il s’avérait qu’il se retrouvait défavorisé, alors il n’aurait aucun scrupule à terroriser son propre équipage pour obtenir la plus grosse part, songea-t-il en posant la main sur la crosse de son cosmodragon. |
|
Retour haut de page |